Arina Atamaniuk est secouriste du bataillon de volontaires « Hospitaliers ». Depuis le début de la grande invasion, elle s’est portée volontaire pour démanteler les maisons détruites dans la région de Kyiv. Parallèlement, elle a étudié les bases de la médecine tactique.
Arina a rejoint l’équipe paramédicale en août 2023. Elle a travaillé dans la région de Kherson, dans les forêts de Kreminna de la région de Louhansk, et a secouru des blessés près d’Avdiivka.
« Au début, mon entourage n’arrêtait pas de me dire qu’une jeune fille sans formation médicale et militaire n’avait rien à faire à la guerre. Je les ai écoutés jusqu’à ce que je rencontre un hospitalier américain en Ukraine depuis les premiers jours de l’invasion. Il se bat depuis les premiers jours de la guerre totale. Il m’a persuadée que je pouvais être utile. Depuis lors, je me suis engagée dans les études des bases de la médecine tactique et j’ai suivi des cours de formation militaire. Je n’ai pas trouvé comment m’engager tout de suite. À un moment donné, j’ai eu de la chance et les hospitaliers m’ont acceptée dans leur équipe », raconte Arina Atamaniuk.
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À propos de la mission de la secouriste en temps de guerre
Nous avons des médecins qui travaillent dans le centre de stabilisation ou dans un hôpital. Il y a des médecins qui aident à évacuer des militaires et assistent lors du transport à l’hôpital. De plus, les structures militaires contiennent un médecin de compagnie, un médecin de brigade et un instructeur sanitaire. Ils ont des fonctions et des missions différentes. Certains sauvent directement des vies, d’autres organisent l’évacuation et la délivrance opportune des médicaments indispensables.
La structure de notre bataillon est particulière. Nous avons des équipages spécifiques, ce sont des équipes qui sont assignées à suivre la direction où aller et qui aider.
Il existe quelques étapes d’évacuation. La première, c’est le casevac (Casualty Evacuation – ndlr). Il s’agit d’un véhicule qui transporte littéralement les blessés des tranchées pour les emmener à l’étape suivante. D’habitude, c’est un point de stabilisation, où la personne ne reste pas longtemps avant de partir à l’hôpital. Il existe également Medevac (Medical Evacuation – ndlr). Il s’agit d’un véhicule comportant d’un équipement spécial pour le transport des blessés, par exemple vers un hôpital.
Notre équipe intervient en premier. Nous disposons de petits véhicules qui peuvent se rendre rapidement sur les lieux, récupérer un blessé et repartir. Ce sont les véhicules dits « casevacs ».
Au sujet du développement de la médecine tactique en Ukraine
Dans de nombreuses brigades, tous les médicaments sont délivrés par des volontaires : allant des tourniquets de base aux véhicules et outillages. La situation s’est considérablement améliorée depuis le début de l’invasion totale. Auparavant, la plupart des couvertures thermiques étaient faites de feuilles d’aluminium qui retenaient simplement la chaleur mais ne réchauffaient pas un humain. À présent, ce sont déjà des couvertures thermiques chimiques qui réchauffent bien. Notre casevac est doté d’un concentrateur d’oxygène portable qui donne la possibilité à une personne de respirer de l’oxygène pur.
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À propos de la peur à la guerre
J’ai réalisé pour la première fois que j’étais en guerre lorsque j’ai fait l’expérience concrète de travailler avec un blessé. Pendant longtemps, j’ai étudié les bases de la médecine tactique de manière théorique dans des simulations où les gens faisaient semblant de souffrir. En réalité, les blessés souffrent énormément. Ils crient, supplient qu’on leur donne des analgésiques ou qu’on fasse quelque chose. C’est en voyant le sang et les membres déchirés de nos soldats que l’on réalise ce que l’on fait réellement et où l’on se trouve.
Tout le monde a peur, à la guerre. Le danger est permanent dans ces conditions extrêmes. Mais vous apprenez à vivre avec ce sentiment. En fait, la peur, c’est votre amie pendant la guerre. Elle aide à survivre. Le plus important, c’est de ne pas laisser la peur nous contrôler mais de se maîtriser. Il faut éviter que la peur se transforme en panique.
En même temps, je n’ai jamais vu une personne blessée devenir hystérique. Ils ne se plaignent pas beaucoup non plus. Ils restent fermes. Lorsque je dois distraire une personne d’une douleur intense ou faire attendre pendant que l’anesthésie prend son effet, je pose toujours les questions sur leurs femmes, leurs enfants. Ils se plongent dans des souvenirs et sourient. En fait, la famille est ce qui aide à supporter toutes les difficultés de la guerre.
Au sujet des vies sauvées
Je me souviens d’un des premiers blessés graves. Nous avons eu un long chemin à faire pour l’évacuer. Cet homme est arrivé avec un tourniquet qui avait été posé quelques heures auparavant. Nous l’avons remplacé par un tamponnement et avons sauvé sa jambe. Sans cela, il aurait fallu l’amputer. Pendant l’évacuation, le blessé nous a raconté qu’il allait se marier dans dix jours. Je n’ai malheureusement pas pu trouver plus d’informations afin de savoir si son mariage a eu lieu à la date prévue ou si les médecins l’ont gardé à l’hôpital, mais notre équipe a stabilisé et sauvé sa jambe. Sans doute que j’ai réagi de manière trop sentimentale quand il m’a dit merci. Avec du temps, on s’y habitue. Les médecins expérimentés se retrouvent régulièrement dans des situations semblables.
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À propos des besoins de médecins au front
Je rencontre beaucoup de gens comme moi, sans formation médicale. Nous apprenons à livrer les premiers soins aux blessés. Et c’est déjà bien. Mais il ne faut pas avoir trop de personnes comme moi, qui n’ont aucune formation. Malheureusement, nous n’avons pas de connaissance approfondie de la physiologie humaine, de la biochimie, etc. J’ai rencontré beaucoup de brigades, qui faisaient face à une pénurie de médecins professionnels à tous les niveaux, des ambulanciers aux chirurgiens. Quel que soit le type de guerre, quelles que soient les armes utilisées, il y aura toujours des blessés. Ainsi, plus il y a de médecins professionnels au front, plus il y a de vies sauvées.