Une campagne sur les réseaux sociaux accuse les agriculteurs ukrainiens de ne pas respecter les normes européennes pour les pesticides et l’élevage de poulet. Or les produits importés subissent des contrôles et les agriculteurs ukrainiens ont investi pour répondre aux exigences du marché européen, ce qui est bon également pour entrer sur d’autres marchés.
Les agriculteurs européens sont vent debout contre les importations de produits agricoles ukrainiens. Ils sont inquiets devant la concurrence croissante avec la production locale pour les céréales, les poulets, les œufs et le sucre sur les marchés de l’UE. Certains invoquent la qualité prétendument douteuse des produits ukrainiens et des violations des conditions d’élevage et de cultures. On attend par exemple souvent que la viande ou les œufs exportés de l’Ukraine ne répondent pas aux normes de l’UE. Alors qu’en est-il du respect des normes européennes?
« D’éventuelles revendications des agriculteurs européens quant à la qualité des produits ukrainiens peuvent être expliquées et non sans raison par un conflit d’intérêts , estime Bohdan Doukhnytsky, directeur de recherche à l’Institut d’économie agraire, interviewé par Tyzhden/The Ukrainian Week. Nous sommes des concurrents. D’autre part, les produits agroalimentaires ukrainiens non seulement maintiennent de manière stable leurs positions sur les marchés mondiaux et régionaux divers, mais ont également confirmé leur qualité et leur conformité aux exigences. Même avant la grande invasion, l’Ukraine vendait des milliers de tonnes de viande de volaille sur les marchés de l’UE pour des millions de dollars ».
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En 2021, l’Ukraine a exporté 85000 tonnes de volaille vers l’Union européenne, d’une valeur de 198 millions de dollars. Et près de 8000 tonnes d’œufs d’une valeur d’environ 10 millions de dollars, selon le Service national des statistiques d’Ukraine.
En pleine guerre totale, en 2023, les exportateurs ukrainiens ont vendu à l’UE 173 000 tonnes de volaille, d’une valeur de 407 millions de dollars et près de 33000 tonnes d’œufs d’une valeur de 39 millions de dollars. Dans le contexte d’une croissance significative des chiffres d’exportation, l’année dernière l’Union européenne est devenue le principal débouché pour les œufs et le poulet ukrainiens.
« Il faut comprendre que depuis toujours l’UE voyait d’un œil très critique les importations agricoles sur ses marchés. Tout au début, ce sont ces exigences qui ont incité les entreprises ukrainiennes à améliorer la qualité de leur production et services et à penser davantage aux conditions de travail de leurs employés et de l’environnement », ajoute-t-il.
De plus, conformément à l’une des exigences européennes, il est interdit d’utiliser les lampes au mercure dans la production agroalimentaire, puisqu’elles contribuent à la pollution de l’environnement. Donc, les producteurs ukrainiens ont opté pour des lampes LED. Un audit environnemental régulier vise les entreprises qui vendent leur produit en Europe.
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Dans le même temps, les exportateurs certifiés par l’UE peuvent ne pas se soumettre à une évaluation similaire une fois qu’ils se commercialisent dans d’autres pays et zones économiques. La certification européenne désigne le statut sans danger pour les consommateurs du monde entier.
« Il est important de comprendre les spécificités de la vente des produits alimentaires ukrainiens sur le marché européen. Il ne s’agit pas de matières premières, céréales, oléagineux, maïs d’aliments transformés et de produits à valeur ajoutée. Ceux-ci comprennent, entre autres, les poulets et les œufs, dont la plupart sont vendus dans les chaînes de supermarchés. Très souvent, les supermarchés exigent un certificat spécial pour être présents dans leurs rayons. Par exemple, Organic, BRC, GlobalG.A.P., etc. », explique Bohdan Doukhnytsky.
Cette certification n’est pas strictement obligatoire, juridiquement parlant, mais elle est fort utile, parce qu’elle permet de confirmer la qualité de la production. De plus, les certificats phytosanitaires ou vétérinaires ainsi que le certificat de circulation EUR.1 sont obligatoires. C’est une condition indispensable pour exporter les produits dans la zone de libre-échange avec l’UE.
Les produits d’origine animale, par exemple les produits laitiers, sont soumis à la réglementation par un système de permis sur la base des résultats de l’audit de l’Union européenne. Selon le Centre national de recherche Institut de l’économie agraire, à la fin de l’année dernière, 55 entreprises du secteur laitier en Ukraine disposaient d’un tel permis.
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« Les envois provenant de pays et de territoires où des foyers de maladies animales ou aviaires ont été identifiés ne peuvent pas franchir les frontières douanières de l’UE », souligne M. Doukhnytsky.
« En 2020, l’UE et d’autres pays ont imposé à deux reprises des interdictions sur le poulet ukrainien. Tout au long de l’année 2021, cette interdiction s’applique également aux poulets qui pouvaient être importés dans l’Union européenne en provenance de régions de notre pays où la grippe aviaire a été détectée. Cependant, par la suite, lorsque la situation s’est stabilisée, les restrictions ont été levées et les exportations ont repris », précise le chercheur.
Ainsi, l’Ukraine exporte vers les marchés européens des produits qui disposent des certificats appropriés et dont la sécurité est garantie pour les consommateurs. En même temps, les exigences de l’UE incitent les entreprises ukrainiennes à améliorer la qualité de leurs produits et services et à améliorer les conditions de travail de leurs employés et le respect de l’environnement.