La guerre en Ukraine n’est pas seulement une affaire de batailles sanglantes, de destructions et d’affrontements géopolitiques, c’est aussi une question de personnes – des personnes simples et ordinaires, jeunes ou âgées, que rien ne décourage et qui triomphent des épreuves avec l’amour de leur pays, malgré l’adversité, malgré les graves blessures, malgré les risques quotidiens. Nous allons vous conter deux histoires: celle d’Oleksandre, et celle de deux collégiens, Yakov et Volodymyr.
Oleksandre et son jardin
Oleksandre Doronin ,70 ans, un habitant d’Avdiivka, a vécu sous les bombes, au quotidien, pendant six mois. Malgré les canonnades, il s’efforçait de mener une vie normale : il prenait soin du ménage, de ses deux chats et de son chien. En août, il a décidé de faire la récolte de ses pommes de terre, et pour ce faire, il devait déminer son jardin. Après avoir réussi à dégager une douzaine de mines, une explosion s’est produite. Il s’est évanoui. À son réveil, sa jambe droite avait disparu.
Tout ce dont il se souvient, c’est d’avoir rampé sur 150 m jusque chez ses voisins; ils l’ont secouru, ont arrêté l’hémorragie et l’ont conduit à l’hôpital le plus proche. Son état était grave; il est resté plusieurs jours dans l’hôpital de Pokrovsk puis celui de Dnipro, avant d’être évacué à Lviv.
Oleksandre est maintenant au centre médical « Incassables » de Lviv depuis plus de six mois. Pendant son séjour, les chirurgiens ont préparé le membre amputé pour l’installation des prothèses; en parallèle, les spécialistes travaillaient avec lui sur sa rééducation physique et psychologique. Dernièrement, sa prothèse a été installée – pour la première fois depuis le mois d’août, Oleksandre a fait quelques pas sans ses béquilles. La rééducation sera longue, mais il pourra retourner chez lui. Parce que, oui, il veut rentrer au Donbass ! Il a vécu toute sa vie à Avdiivka. Et bien qu’il n’ait plus de famille dans la ville, il rêve d’y retourner. L’y attendent ses chats et son chien. Et le jardin? Il faut s’en soucier, le cultiver, et qui le fera ?
Volodya et Yakiv : « Nous reviendrons coûte que coûte ! »
Chaque semaine, les ambulances et les trains évacuent à Lviv des blessés provenant des hôpitaux de première ligne. Ce ne sont pas toujours des adultes, il y a aussi des enfants. En juillet, les frères Volodia et Yakiv ont été sauvés des décombres dans le village de Sergiyivka près d’Odessa. Un missile russe a frappé leur maison, avant que la famille ait pu se mettre à l’abri. Leur mère et leur beau-père ont été tués sur le coup. Les enfants ont survécu.
Yakiv, 8 ans, a été très grièvement blessé au cou par un fragment du missile. Pour éviter les risques d’une importante hémorragie, les secouristes ont dû clamper un vaisseau. Malheureusement, le manque d’oxygène a provoqué un accident vasculaire cérébral; son côté gauche est resté paralysé, tandis que son bras droit était immobilisé en raison d’une fracture de l’épaule.
Son frère aîné, Volodya, 14 ans, souffre d’un traumatisme crânien, il a de nombreuses blessures au visage et une fracture au bras droit.
Les deux blessés ont d’abord été emmenés à l’unité de soins intensifs d’un hôpital proche, à Odessa, puis évacués à Lviv par le train. Les équipes de rééducation ont pris soin des deux frères. Le plus jeune a déjà réappris à marcher et à utiliser sa main gauche. Leur cousine, Yevheniia, est venue de l’étranger pour les voir. Elle a pris la décision de les emmener avec elle en Autriche, où ils poursuivront leur rééducation; du moins, tant qu’il y a la guerre. En quittant l’Ukraine, Yakiv et Volodya ont affiché leur volonté: « nous reviendrons coûte que coûte ».