Le comité international de la Croix-Rouge reste silencieux sur les entraves à son travail en Russie

Guerre
29 avril 2023, 11:16

Le Comité Internationale de la Croix-Rouge ne cherche pas à savoir si les Ukrainiens enlevés par la Russie ont participé à la guerre. Il donne à chacun le statut de prisonnier de guerre car c’est ainsi que la Russie les définit. De plus, les représentants de la Croix-Rouge n’ont accès qu’aux cellules de prisonniers que les Russes les autorisent à voir. Mais lorsque ses représentants sont interrogés sur ce sujet, ils évitent de parler des entraves à leur activités qu’ils subissent de la part des autorités russes.

« Le Comité international de la Croix-Rouge n’a pratiquement pas accès aux prisonniers civils sur le territoire de la Russie et enregistre tous les Ukrainiens comme prisonniers de guerre », explique ainsi à Tyzhden.fr Kateryna Ogievska, représentante de l’ONG Civils en captivité. Cette association aide les familles à rechercher leurs proches qui ont été enlevés par les occupants.

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Selon Kateryna Ogievska, leur organisation et d’autres associations ukrainiennes ont rencontré le CICR à l’occasion du changement de président du Comité. Au cours de cette conversation, la question s’est posée de savoir si les représentants du CICR avaient vu les civils dans leurs cellules, car il n’y a pas de combats sur le territoire de la Russie et le Comité devrait avoir accès aux prisonniers.
« On nous a dit que des délégations visitaient les lieux de détention, mais qu’elles n’étaient autorisées à le faire que de manière sélective, là où la Russie le décidait. Des représentants du CICR affirment que s’il y a des civils parmi les détenus dans les cellules, ils ont été enregistrés puis leurs proches ont été prévenus. Il y a peu de cas de ce genre, mais il existe des cas où la présence d’un civil en captivité a été confirmée par le CICR », déclare Mme Ogievska.

Un problème majeur pour l’organisation des échanges est que tous les prisonniers en Russie reçoivent le statut de prisonniers de guerre, qu’ils aient ou non participé aux combats, ajoute le représentant de l’ONG. Par conséquent, le CICR s’appuie sur la manière dont le pays agresseur représente les Ukrainiens. L’activiste souligne que cette façon de procéder complique considérablement les recherches, ainsi que le retour des civils à la maison : « Nous avons constaté qu’au cours de la première année, voire des six premiers mois, c’est à Koursk et à Belgorod que les Russes gardaient le plus de monde. Puis de nouveaux lieux sont apparus. Les prisonniers pouvaient être transférés plusieurs fois par mois. Personne ne comprend ce système. Mais c’est probablement pour brouiller les pistes, afin que la personne ne soit pas retrouvée. Aujourd’hui, nous découvrons sans cesse de nouveaux lieux de détention que personne ne connaissait. La situation est vraiment très difficile ».

Une autre activiste ukrainienne, la présidente de l’association Femmes d’acier, Natalia Kravtsova, exprime également de l’amertume au sujet de la collaboration avec la Croix-Rouge. « La plupart du temps, la communication avec le Comité sur cette question est inefficace », confie-t-elle à Tyzhden.

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Liubov Gerasimiuk qui recherche son mari disparu au combat, raconte à peu près la même chose. Elle a pu assister à une réunion avec le CICR à Ivano-Frankivsk. Il y avait beaucoup de gens qui ont « accablé » les représentants du CICR de questions. Mais la plupart d’entre elles sont restées sans réponse. « Ils disent qu’ils sont médiateurs. Nous leur avons demandé pourquoi ils ne vérifiaient pas différentes prisons sur la territoire russe, mais selon eux, ils ne pouvaient pas nous dire où ils étaient allés », se souvient la femme.

« La Croix-Rouge reste un outils imparfait mais indispensable dans les discussions avec les envahisseurs », dit pour sa part Natalia Petrenko, juriste ukrainienne. Selon elle, tout le système de communication avec Moscou est erronée « dés le départ, depuis sa conception », et doit être repensé le plus vite possible. « En attendant, on fait ce qu’on peut avec ce qu’il y a », a-t-elle conclu.