«Elle s’est effondrée»: cinq faux de la propagande russe sur la destruction de la centrale de Kakhovka

Politique
7 juin 2023, 18:42

Réalité : L’Ukraine n’a pas démoli sa propre centrale hydroélectrique de Kakhovka en causant une catastrophe technologique sur son territoire. Cette centrale est occupée par les troupes russes depuis 2022. C’est l’armée russe qui a miné les assemblages de la centrale en automne 2022. Le 6 juin, simultanément à une attaque massive de missiles sur les villes ukrainiennes, les occupants ont fait sauter à distance la centrale hydroélectrique.

Au petit matin du 6 juin, simultanément à une nouvelle frappe massive de roquettes sur les villes ukrainiennes, les occupants russes ont fait exploser la centrale hydroélectrique de Kakhovka. Selon le président ukrainien Volodymyr Zelensky, les troupes d’occupation ont effectué un minage interne des structures de la station à 02h50 du matin. Près de 80 localités se trouvent dans la zone inondée et des dizaines de milliers de personnes sont en danger.

Malgré un grand nombre de photos et de vidéos, attestant les déclarations des autorités ukrainiennes relatives à l’explosion de la centrale hydroélectrique de Kakhovka, les médias russes ont prétendu que « la ville de Nova Kakhovka était saine et sauve ». De plus, ils ont rapporté que l’information concernant l’explosion de la centrale était « absurde ».

Plus tard, lorsque la réalité de la catastrophe est devenue irréfutable, les médias du Kremlin ont diffusé un taux de théories sur la destruction de la centrale hydroélectrique de Kakhovka. Leurs fantasmes vont du récit relatif « au barrage qui s’est effondré » aux thèses sur les « missiles ukrainiens qui bombardent la centrale hydroélectrique de Kakhovka ». Les journalistes de StopFake ont étudié les cinq principales interprétations des médias russes sur l’explosion de la centrale hydroélectrique de Kakhovka.

Capture d’écran – iz.ru

Faux 1 : « C’est l’Ukraine qui a détruit la centrale hydroélectrique de Kakhovka. L’armée ukrainienne a frappé à partir des systèmes de lance-missiles ukrainiens Olkha »

Réalité : L’Ukraine n’a pas détruit sa propre centrale, exposant en danger la vie de centaines de milliers de civils ukrainiens et causant une catastrophe technologique sur son territoire. La station se trouve sous occupation russe depuis 2022. C’est l’armée russe qui a accès à l’installation stratégique et qui l’a totalement sous contrôle.

La nouvelle sur l’explosion a été diffusée par le commandement opérationnel « Sud » (l’une des structures militaires ukrainiennes de l’Armée de terre ukrainienne – ndlr). Les médias russes ont alors tenté de dissimuler ce sujet, en rapportant qu’il s’agissait d’une « désinformation de la part de l’armée ukrainienne ». Les occupants russes ont continué à nier le fait de l’explosion de la centrale jusqu’à ce que les autorités ukrainiennes déclarent l’état d’urgence et lancent une évacuation de la population de la zone inondée.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a souligné que le sapement de la centrale de Kakhovka avait été effectué depuis l’intérieur de la station car en raison de l’occupation russe, l’Ukraine n’a pas eu accès à l’installation depuis longtemps. Il a également rappelé un fait bien connu que toutes les centrales hydroélectriques soviétiques ont été construites en tenant compte de la probabilité d’une guerre et comportent une réserve de sécurité contre les missiles et autres attaques aériennes. Les propagandistes russes préfèrent garder le silence à ce propos.

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Le secrétaire du Conseil national de sécurité et de défense, Oleksiy Danylov, a rapporté que l’Ukraine avait déjà des données sur les responsables de l’explosion de la centrale hydroélectrique de Kakhovka. Selon Danylov, les militaires de la 205e brigade motorisée des forces armées russes qui détenait l’installation sont responsables de la catastrophe survenue sur le territoire ukrainien.

Andriy Yusov, le représentant de la Direction générale du renseignement du ministère de la Défense ukrainien, a souligné que la partie ukrainienne était en possession de preuves confirmant que les occupants russes avaient fait exploser la centrale ukrainienne à distance. La direction du renseignement d’État a précisé que l’Ukraine avait bien montré à la communauté internationale le fait que les Russes avaient transporté des explosifs et des équipements nécessaires à la centrale hydroélectrique de Kakhovka.

Déjà en octobre 2022, le président Zelensky avait signalé que « des terroristes russes ont miné le barrage et les modules de la station ». Il a appelé la communauté internationale à envoyer instamment des observateurs sur le terrain, envahi par les Russes. Il a rapporté qu’il fallait assurer le déminage immédiat de la centrale hydroélectrique de Kakhovka. Les avertissements ukrainiens n’ont pas été entendus et le 6 juin 2023, la Russie a fait sauter la station.

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À présent, l’Ukraine a convoqué une réunion d’urgence du Conseil de sécurité des Nations unies, pour soulever la question de l’attaque russe devant l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Kyiv utilise les mécanismes de protection civile de l’Union européenne, fait appel aux organisations environnementales internationales et à la juridiction pénale internationale. Les autorités recourent à tous les mécanismes pour prouver la culpabilité de la Russie et traduire l’agresseur en justice.

L’OTAN, le Conseil de l’Europe, le Conseil européen, le Royaume-Uni, les leaders d’État de l’Union européenne et bien d’autres encore s’expriment en masse pour soutenir l’Ukraine. Les dirigeants du monde démocratique condamnent les actions terroristes russes. Les alliés de l’Ukraine soulignent que la seule raison de la catastrophe de Kakhovka est l’invasion brutale de l’Ukraine par la Russie.

Faux 2 : « Il est possible que les Ukrainiens se préparent depuis longtemps. Ils accumulaient l’eau dans le réservoir de Kakhovka… Il était nécessaire pour Kyiv de remplir le réservoir de Kakhovka avant de faire sauter la station ».

Réalité : Les médias russes ont fait circuler des informations erronées sur l’« inondation délibérée de la centrale hydroélectrique de Kakhovka » depuis mars 2023, c’est-à-dire avec le début des crues printanières en Ukraine. Il s’agit d’une fiction anti-scientifique et les autorités ukrainiennes n’ont rien à voir avec les inondations. En réalité, la hausse du niveau du Dnipro dans différentes régions d’Ukraine au printemps 2023 a été déterminée uniquement par des facteurs naturels. C’était le processus naturel, causé par l’accumulation de neige et de glace en hiver.

La série de retenues d’eau du Dnipro est composée de six centrales hydroélectriques et permet de réguler le processus de crue printanière de la rivière. En haute saison de la crue du Dnipro, c’étaient cinq des six centrales hydroélectriques qui étaient impliquées. La sixième, la centrale de Kakhovka, ne fonctionnait pas et ne régulait pas les niveaux d’eau en raison de la saisie de la centrale par les Russes et des dommages causés par les occupants à la structure hydrotechnique.

Ainsi, il ne s’agit pas de « débordement délibéré du réservoir de Kakhovka, organisé par Kyiv ». StopFake a analysé ce faux dans l’article « Faux : L’Ukraine inonde délibérément la centrale hydroélectrique de Kakhovka et la centrale nucléaire de Zaporijja ».

Faux 3 : « Le barrage de la centrale hydroélectrique de Kakhovka s’est effondré non pas à la suite d’une explosion, mais en raison de dommages préalables »

Réalité : Le passage ordinaire de l’eau ne pouvait pas causer de telles destructions du barrage. La barrière a été construite pour résister à tous les risques naturels possibles. Le barrage a résisté à plusieurs reprises à la pression de l’eau à des vitesses élevées.

Questionné par StopFake, Konstantin Danko, hydrologue, professeur agrégé de Géographie, a expliqué que le barrage n’a pas pu s’effondrer pour des raisons naturelles à moins qu’un impact physique ne soit ajouté de l’extérieur par des attaques et des frappes, ou qu’il ne soit physiquement détruit par la force. Seules des attaques armées de la part des occupants russes ont pu provoquer ces destructions. C’est ce qui s’est passé au petit matin du 6 juin.

Il convient également de préciser que la centrale hydroélectrique endommagée en automne 2022, lors de la retraite des troupes russes de la rive droite du Dnipro vers la rive gauche, a résisté au plus fort des inondations de printemps et ne s’est pas effondrée. Elle a résisté à la pression maximale de l’eau. Cela prouve une fois de plus la fausseté de la théorie russe selon laquelle « la station s’est effondrée ».

Faux 4 : « La destruction du barrage du réservoir de Kakhovka est peu probable. Rien de trop urgent pour provoquer une panique pour le moment »

Réalité : Selon la société d’État Ukrhydroenerho, la station démolie par les occupants russes a été complètement détruite et n’est pas réparable. La société estime que l’explosion, organisée par les Russes, a détruit 16 barrières, le centre de la centrale et le barrage en terre entre le bâtiment de la centrale et l’écluse, le bureau administratif (selon les données à 11h00 le 6 juin). Vers midi le 6 juin, la centrale hydroélectrique de Kakhovka était complètement recouverte d’eau. Dans la région de Kherson, l’eau atteignait les toits des maisons et cette inondation créée artificiellement par les Russes a commencé à démolir des logements privés.

Dans un commentaire adressé à StopFake, l’hydrologue Konstantin Danko a qualifié de ridicules et de cyniques les déclarations des médias russes concernant « l’absence de destruction du barrage HPP de Kakhovskaya ».

« Compte tenu des nombreuses photos et vidéos diffusées par des utilisateurs de réseaux sociaux et des médias, il est possible d’affirmer que le barrage est totalement détruit. Suite à cette destruction, il y a une inondation progressive des surfaces, des dommages, des endommagements aux constructions et aux immeubles en aval. Une fois le plus haut de la vague passé, il faut s’attendre à une baisse progressive des niveaux d’eau, qui aura lieu pendant une semaine. Après cela, le courant du Dnipro sur le site de la centrale détruite, sera assuré par le régime d’exploitation du réservoir de Dnipro et de la centrale de Dnipro », a-t-il dit.

Faux 5 : « Il n’est pas question de cesser le transfert d’eau à travers le canal du nord de la Crimée… La Crimée n’est pas menacée »

Réalité : La destruction de la centrale hydroélectrique de Kakhovka en juin 2023 par les troupes d’occupation russes a mis en danger le fonctionnement d’un certain nombre de structures énergétiques, industrielles, agricoles et autres, qui dépendaient du régime d’exploitation du réservoir d’eau de Kakhovka. Il s’agit de régions du sud de l’Ukraine, y compris la Crimée temporairement occupée. Dans peu de temps, toutes les fermes agricoles qui utilisent les eaux du Dnipro seront affectées par cette catastrophe. L’impact sera alors dévastateur sur la nature et le potentiel socio-économique de la péninsule.

« Ces conditions persisteront tant que le niveau d’eau du fleuve Dnipro ne descendra pas en dessous du volume mort du réservoir (12,7 m). Après cela, le fonctionnement de tout ensemble économique, alimenté par le Dnipro, sera considéré comme défaillant, c’est-à-dire incapable d’assurer des processus de production. Cela concerne absolument les entreprises industrielles, les services publics, les systèmes d’irrigation, etc. Il est bien évident que la destruction du barrage de la centrale hydroélectrique de Kakhovka aura un impact négatif sur les conditions du fonctionnement de la centrale de Zaporijjia et ces conséquences sont encore difficiles à évaluer. Le barrage a créé le réservoir de Kakhovka, un lac artificiel, qui permet l’irrigation des steppes au sud de l’Ukraine et du nord de la Crimée, via le canal du nord de la Crimée. Ce canal cessera également de fonctionner après la baisse des niveaux d’eau dans le site de la destruction », a précisé Konstantin Danko.

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Le bureau du président Volodymyr Zelensky a annoncé que la destruction de la centrale hydroélectrique de Kakhovka par les Russes était à la fois un coup pour la sécurité alimentaire mondiale et un véritable écocide pour l’Ukraine. De plus, la destruction du barrage pourrait priver la région de Kherson et la Crimée d’eau potable.

Auteur:
StopFake